A la recherche des disparus de la guerre d’indépendance | Textures du temps

Il y a quelques années, j’ai entrepris de mener des entretiens biographiques avec des militants de gauche. Ce travail n’est pas encore terminé, mais en chemin se sont révélés des embranchements imprévus. Car en vous racontant leurs vies militantes, ces hommes et femmes vous racontent aussi leurs vies. De vie en vie, j’ai compris qu’il me faudrait un jour écrire sur 1962.

Au cours d’un entretien à la Librairie Ijtihad, un de mes interlocuteurs me racontait comment il était devenu militant, et avait commencé par raconté « son indépendance ». Alors que sa famille avait migré vers Alger durant la guerre —comme de nombreuses autres familles— ils avaient retrouvé refuge dans leur village d’origine en Kabylie au moment de la violence de l’OAS. Il se souvenait de diverses tâches qu’avec les autres jeunes du villages ils s’étaient données durant la période transitoire puis l’été de 1962 : visites des régions alentours pour dresser les bilans (décompte des morts, des survivants, des maisons détruites…), mais aussi participation à des cérémonies de réinhumation de corps de mujahidin ramenés au village. Ces corps, leurs proches étaient allés les chercher, et lorsqu’ils avaient pu les trouver, les avaient ramenés. Les jeunes présents lors des cérémonies, chantaient des anashid [hymnes nationalistes]. Alignés en tenue de scout, ils jouaient un rôle quasi-officiel dans un cérémonial encore balbutiant, représentant en somme l’autorité absente (ou non encore présente sur les lieux) de l’État algérien.

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