Matériaux pour une histoire de l’enseignement du paysage à Bordeaux (1991- 2017) | Politiques de la culture

Longtemps considéré comme un art mineur se rapprochant de l’horticulture ou une discipline annexe dans la formation des architectes, l’enseignement du paysage a connu une destinée singulière à Bordeaux. Cet article vise à rendre compte de l’état d’avancement d’une recherche qui porte sur les caractéristiques et l’évolution, depuis sa création en 1991 jusqu’à aujourd’hui, de l’enseignement du paysage à l’École nationale supérieure d’architecture et de paysage de Bordeaux (ensapBx).

Dans cette perspective, nos investigations se sont tout d’abord évertuées à mettre à jour les conditions et les raisons qui expliquent l’émergence de l’enseignement du paysage à Bordeaux. Nous avons ensuite cherché à saisir de quelle manière l’environnement institutionnel et administratif a conditionné son développement. Enseigner le paysage dans une école d’architecture n’a en effet rien d’anodin. Par ailleurs, nous avons souhaité comprendre sur quel genre de postulats les pratiques pédagogiques se sont fondées. Ces éléments sont en cours de construction et sont encore loin d’être tout à fait consolidés. Ainsi il ne faut pas voir dans ce texte une présentation linéaire de résultats définitifs prêts à être intégrés dans une recherche d’ensemble. Il s’agit plutôt de fragments qui en dessinent une architecture provisoire. In fine, l’objectif est de proposer aux lecteurs des matériaux qui doivent créer les conditions d’un débat.


Le retour du paysage : demande sociale, reconnaissance professionnelle et essor de la recherche scientifique

Au cours des années 1980-1990, on assiste à une montée en puissance de la demande sociale de paysage (Dubost, 1994 – Luginbühl, 2001). Si elle est polymorphe et prend des aspects et des directions parfois divergentes et contradictoires, cette dernière favorise la reconnaissance sociale et politique du paysagisme en tant que champ d’expertise singulier et pratique professionnelle alternative (Dubost, 1983 – Marot, 1995 – Pernet, 2011). Pourtant, malgré une demande sociale croissante et un marché professionnel en pleine expansion, le nombre de praticiens paysagistes reste faible. Au début des années 1990, l’École nationale supérieure de paysage (Ensp) de Versailles ne forme qu’une cinquantaine d’étudiants par an (Luginbühl, 1996). Au regard de ces chiffres, on peut considérer que la création de la formation de Bordeaux permet de largement compléter ces effectifs.

Dans le même temps se produit un « retour du paysage » dans les sciences (Dubost, 1991 – Luginbühl, 2007). Cet essor se déploie aussi bien dans les sciences humaines que dans les sciences naturelles. Pour notre propos, il convient de souligner qu’au sein de cette communauté scientifique, il existe alors une école toulousaine active et vigoureuse. Celle-ci se structure autour de la figure de Georges Bertrand, qui propose de faire du paysage une « science diagonale » (1972) pour penser les relations société/environnement.

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