Sous une fausse bannière. Comment l’extrême droite adopte des symboles antiquisants de la culture-pop dont l’histoire a pourtant tout pour lui déplaire | Antiquipop

Dans la nébuleuse d’extrême droite, sujet d’actualité abondamment débattu, un groupe apparaît particulièrement agressif : le mouvement identitaire, en allemand Identitäre Bewegung (IB). Aujourd’hui organisé au niveau international, il orchestre une sorte d’« Agit-pop » sur la scène de l’ultra-droite. Héritier de l’organisation française Unité radicale, il est désormais actif au niveau européen, en particulier en Autriche. Dans plusieurs pays, il a été mis sous observation par les services de renseignement. Ces activistes cherchent à compenser la relative faiblesse de leurs effectifs par des mises en scène médiatisées nourries de symboles « métapolitiques » spectaculaires comme des occupations ou des blocus. La mise en place d’une barrière frontalière ou, plus récemment, celle d’un « monument » devant la porte de Brandebourg, sont autant de happenings qui plaident pour un emmurement de l’Europe et attisent la haine contre les faibles, les réfugiés et les clandestins. S’appuyant sur le concept d’« ethno-pluralisme » ils définissent plusieurs cultures homogènes différentes qu’il convient de « défendre » contre les influences extérieures, non seulement par des mots, mais aussi par des actes.

Ces protecteurs autoproclamés de la patrie ont vite compris que, dans un monde globalisé, la promotion des seules références monoculturelles ne suffit pas à définir un État, et ils se sont récemment tournés vers la culture pop internationale, habituellement peu appréciée dans leurs rangs. Au cours de leurs manifestations, il agitent désormais des drapeaux « pop », ornés d’un chevron noir sur fond jaune du plus bel effet.

Il s’agit en l’occurrence du lambda, onzième lettre de l’alphabet grec. Dans l’ancienne Sparte, le Λ faisait office d’abréviation pour Lacédémone (Λακεδαίμων), le nom antique de la cité grecque, un symbole que les hoplites auraient alors peint sur leurs boucliers, en guise de signe distinctif. Ce sigle a été popularisé par le film d’action 300, du réalisateur américain Zack Snyder. Ce blockbuster hollywoodien sorti en 2007 présente sur un mode martial la célèbre bataille des Thermopyles, où une coalition grecque de quelques milliers de combattants, parmi lesquels 300 hoplites du roi Leonidas, affronta en 480 av. J.-C. les 50 000 soldats du roi de Perse Xerxès. Si l’on en croit l’historien Hérodote, une trahison (version antique de la légende du coup de poignard dans le dos) a permis aux Perses de prendre à revers la défense grecque, celle-ci (dont l’ensemble des Spartiates) se sacrifiant jusqu’au dernier homme. Les raisons de cet échec restent obscures, certains historiens athéniens allant jusqu’à y voir une défaillance de Sparte, d’autant que c’est à la flotte d’Athènes que la Grèce dut, un an plus tard, sa victoire contre la Perse.

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